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Michel Le Breton

mercredi 9 août 2023 , par Fred, Henri

Michel Le Breton de la Perrière, la Bréchoulière,
"Mort pour la France" le 28 Juin 1945 au Viet-nam.

Michel Le Breton

ses Parents

Château de la Bréchoulière côté Nord

Château côté Sud

Transcription de l’acte de décès "Mort pour la France"

Document officiel dossier militaire de décès

Carte d’Indochine

Michel Marie François Xavier Le Breton de la Perrière est né le 9 Juillet 1912. Il commence ses études au collège des Frères de Ploërmel, mais il accomplit toutes ses humanités, de la 7° à la première incluse, au Collège St-Martin des Pères Eudistes, de Rennes. Esprit très fin, ses goûts se portaient vers la littérature, dans laquelle, servi par une mémoire fidèle, développée par un travail opiniâtre, il remporta des succès très marqués. Il savait par cœur ses classiques français et latins. Mais il ne négligeait pas pour autant les sports.
Aux vacances, il aimait le calme reposant à la maison familiale de la Bréchoulière, à quelques centaines de mètres du bourg des Touches, sur la route de Nort-sur-Erdre en Loire-Inférieure. Accoudé à la fenêtre de sa chambre, le regard errant dans la verdure ondoyante des sapins centenaires, coiffés de choucas croassant et peuplés de ramiers discrets, Michel rêvait d’horizons où le soleil s’abat sur des mers tropicales.
Bachelier, Michel entre à la Société Générale à Angers, désireux de suivre la carrière de son père.

En 1934, il accomplit son temps de service militaire au 13° Régiment de tirailleurs algériens, à Fez, où il gagne rapidement les galons de sergent. La discipline stricte, mais libérale du Maroc, lui manqua, quand son régiment fut ramené en France, pour tenir garnison à Metz. La nostalgie des atmosphères coloniales le reprit avec fougue. Le Ministère de la Guerre demande précisément à l’époque des sous-officiers désireux de contracter un rengagement dans les troupes coloniales, avec promesse d’être dirigés dans les six mois dans une colonie. Michel signe et, après avoir passé au Ministère de la Guerre un stage de 6 mois, il rejoint son poste : Hanoï, (Etat-Major de la Division Tonkin), le 9 Avril 1939, jour de son embarquement à Marseille.
Les armées nippone et française vivront côte à côte, entretenant des rapports apparemment corrects.

Dès Juin 1940, les Japonais font sentir le poids de leur main de fer. Août 1944, les relations se tendent : la Résistance s’organise avec l’appui des Alliés. Comme en France, ce n’est plus que maquis, parachutages, en vue de la guérilla prochaine. Le plan est que les unités cantonnées dans les villes prendront la brousse en des points organisés secrètement à proximité des terrains de parachutage. Le 9 Mars 1945, à Hué, le Colonel Ragot, chef de la Résistance en Annam, alerte toutes les garnisons et prescrit l’exécution des plans prévus. Le même jour, les Japonais attaquent les casernes. L’Etat-Major de la Division Coloniale "Annam-Laos", en garnison à Hué comprenait six bureaux, le sergent-chef Michel de la Perrière était secrétaire au 1° Bureau, en outre, il a pour mission d’assurer, avec le sergent-major Jacquot, la réception des radios chiffrées, expédiées par Saïgon et par Calcutta.

Le 9 Mars, Michel de service de 12 à 14 heures, reçut de Calcutta un message : imminence de l’attaque japonaise, ordre de repli dans la brousse. Il avise aussitôt ses chefs, mais ceux-ci décident d’attendre la confirmation du message, car ils en avaient capté déjà bien d’autres du même genre. Dans la soirée, à 21 heures, le sergent-major Jacquot reçoit un message de Hanoï, annonçant que les Japonais attaquent et encerclent la ville, et ordonnant le repli immédiat des forces de Hué. Dans la nuit, le Colonel Ragot, le Lieutenant-Colonel Valéry et un petit détachement n’ont que le temps de sauter le mur et de gagner la brousse, sous la fusillade et la canonnade, ils s’enfoncent dans l’intérieur, où le péril est partout : la fièvre, le typhus, la dysenterie, le climat meurtrier, la trahison établie dans chaque case en bambous des indigènes, les sangsues qui se vissent par douzaines aux jambes et au corps.

C’est une marche exténuante à travers les marécages, nous apercevons Biên-Diên, puis nous arrivons au village de Lang-Hoï. Nous passons une nuit à Hawaï, qui n’a rien de commun avec les îles du même nom. Ensuite beaucoup de bourbiers et quelques gués à passer. Point de rassemblement : Ashau, repaire de la Résistance, où les groupes trouveront vivres, armes et munitions. Chacun s’exerce au maniement des armes nouvelles : carabines et mitraillettes bien connues de nos maquisards de France. Puis après des marches épuisantes, ils arrivent à B. Plock le 20 Avril. A B. Plock, presque tous les Français sont malades, le ravitaillement est des plus difficiles, en raison de la mauvaise volonté manifestée par les indigènes. Il faut partir toujours plus vers le sud.

Le 22 Avril, la petite troupe reprend la lutte contre la nature et les fléchettes mortelles, le groupe de 19 hommes tombent dans une embuscade, un mort. Le 30 à Dac Xuông, où l’on soigne les plaies. Puis c’est Dac Chome, le 3 Mai. Le 5 Mai à Ban-Talan, le gros de la troupe retrouve les hommes qui s’étaient séparés pendant le combat. Le Colonel Valéry ordonne que le groupe se scinde en deux pour se rejoindre vers Tampong, à grand peine, ils y arrivent le 19 Mai.
Le sergent-chef Michel de la Perrière, marqué depuis plusieurs semaines par le mal, endure stoïquement la détresse de la situation, son pauvre corps est au terme de ses ressources, mais dans son corps débile vit une âme de fer. Sa douceur native ne l’abandonne pas un moment, son humeur est toujours égale à elle-même. Le soir du 25 Mai, dans la case enfumée, il est là avec ses camarades autour du feu, assis, les jambes repliées sous lui. A qui, à quoi peut-il penser, sinon à sa mère, à son père, qui, là-bas sur la pelouse de la Bréchoulière reverdie au retour de ce nouveau printemps, espèrent en son salut et prient pour son retour ; à ses sœurs, dont l’une est au service de Dieu ; à la nichée de ses petits-neveux ; au joli village des Touches, à son église aux ornements d’une richesse royale sortis de leur coffre deux fois dans l’année ; au coquet manoir où, si Dieu le permettait, il ferait si bon vivre ! Le sergent-chef de La Perrière, commence à délirer. Ses propos deviennent incohérents... il sombre dans le coma...

Dans la case, chambrée hantée de moribonds, le Lieutenant-Colonel Valéry se soulève avec peine : "Mon Dieu, murmure-t-il, donnez-moi pour un instant le pouvoir d’un prêtre", il décrit sur la tête du mourant le signe de l’absolution, récite les prières des agonisants et lui ferme les yeux, Michel de la Perrière expira le 28 Mai 1945 à 11 heures. L’après-midi, le corps du sergent-chef, ceint d’une simple natte, est descendu dans une fosse que les indigènes ont creusée, au pied d’un gros arbre, en dehors du village. Le Lieutenant-Colonel, en quelques mots jaillis de son cœur déchiré, dit adieu à celui qui avait une foi ardente dans les destinées de la France et qui ne la verra plus ! Les moribonds, ses camarades, dans un sursaut d’énergie, se trouvent debout et lui présentent les armes. Le 31 Mai, après un dernier adieu à la tombe de Michel de la Perrière, sur les 19 hommes du détachement, onze sont morts, les huit survivants levèrent le camp.
Le 3 Juin, ils furent faits prisonniers par un groupe de miliciens de la garde indochinoise au service des Japonais. Le chef se dit représentant de l’armée nippone et qu’il a ordre de conduire les prisonniers au commandement Japonais de Saravane. Les huit survivants seront libérés en Octobre 1945, par les hommes du général Leclerc.

Chronologie Vietnam

  • 9 mars 1945 : l’ambassadeur japonais Yatsumoto remet à l’amiral Decoux un ultimatum exigeant le contrôle des forces militaires et navales stationnées en Indochine, ainsi que de l’administration française. Devant le refus de ce dernier, les Japonais attaquent les forces françaises très inférieures en nombres et occupent l’ensemble du pays. Seuls les hommes du général Alessandri parviennent, par le nord du Tonkin, à gagner la Chine demeurée sous le contrôle de Tchang Kai Shek. De nombreux prisonniers sont exécutés ou torturés par les Japonais ou détenus dans des conditions atroces dans les camps de concentration nippons, notamment celui de Hoa Binh.
  • 10 mars 1945 : les Japonais chassent l’administration française et proclament l’indépendance du Vietnam en maintenant l’autorité de l’empereur Bao Dai et en laissant d’abord Pham Quynh à la tête du gouvernement. Il y est cependant remplacé quelques jours plus tard par Tran Trong Kim.
  • 24 mars 1945 : Déclaration du Gouvernement Provisoire de la République Française sur la création d’une fédération indochinoise au seine de l’Union Française.
  • 4 mai 1945 : le terme de Vietnam remplace officiellement celui d’Annam.
  • Juin 1945 : le Viet Minh établit une zone "libérée" en Haute Région.
  • 5 octobre 1945 : arrivée à Saigon du général Leclerc, bientôt suivi par une division blindée.

L’empereur que de Gaulle voulait pour l’Indochine - Le Point 10 août 2023

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